Compter sur la communauté

joshua-rawson-harris-KRELIShKxTM-unsplash

Génération Y

Compter sur la communauté

 

Tout comme ce fut le cas à la fin des années 60, une nouvelle génération est sur le point d’imposer ses valeurs à la société. Depuis février 2024, Statistiques Canada estime que la génération Y, les milléniaux, a dépassé en nombre les baby-boomers. 

 Une génération fondamentalement différente des précédentes
 
Les baby-boomers ont inventé une société où les services communs, la résolution des problèmes sociaux, le partage de la richesse ont été confiés à l’État et à des organisations qu’il finançait. Partout en occident, la taille des états a beaucoup augmenté et les responsabilités qui leur étaient confiés ont connu une forte croissance. Au Québec cette vision de la société est encore largement dominante. Toutefois, les difficultés des états à fournir des services de proximité ont contribué à l’émergence de groupes communautaires capables de fournir des services de première ligne aux groupes de la population en difficulté.
 
La génération X s’est moulée à la vision des baby-boomers. C’est une génération en attente que les baby-boomers leur donnent une place. Une génération qui se définit par ce qu’ils ont : leur maison, leur auto, leur travail, leurs enfants, etc. Ils achètent beaucoup, ils ont besoin de posséder des biens qu’ils peuvent montrer. Cette « personnalité particulière », associée à leur désillusion face à l’État, met une pression importante sur les finances publiques :  ils revendiquent des baisses d’impôts pour pouvoir acquérir plus de biens, soutiennent les politiques d’austérité, veulent des voitures et des maisons de plus en plus grosses, etc. Ils s’impliquent peu dans les milieux communautaires, mais les acceptent parce que collectivement, ils préfèrent déléguer à quelqu’un d’autres qu’eux la tâche de s’occuper des plus démunis. Cependant, en réclamant un meilleur contrôle des finances publiques, ils les fragilisent. « Tant pis » disent-ils !
 
La génération Y voit le monde autrement. Ils se définissent par ce qu’ils sont. Enfants rois, ils ont développé un grand sentiment de compétence. Ils exigent du respect et, surtout, de la reconnaissance. 
 
Ils ont des valeurs morales très fortes : équité, égalité, justice pour tous, tolérance. Ils sont ouverts à toutes les différences, qu’il s’agisse de la race, du sexe, du statut socioéconomique, des opinions politiques, de l’orientation sexuelle … Enfants de la mondialisation, le multiculturalisme est pour eux une réalité qui n’est pas remise en question. Les réseaux sociaux leur permettent d’entretenir des relations qui ne connaissent pas de frontières. Survalorisés pendant leur enfance, ils ont une conscience très élevée de leur place dans l’univers.
 
Des discussions avec les intervenants des Carrefours Jeunesse-emploi laissent présager que les Y qui sont en difficultés ont cette même confiance en eux. C’est le manque de reconnaissance qui les démobilise.
Ils envisagent leur vie comme une suite d’expériences de toutes sortes. Que ce soit au travail, dans leur vie familiale, dans leurs relations avec leurs amis, tout est vu comme une façon différente de vivre. Il est essentiel pour eux de s’impliquer directement dans ce qu’ils vivent, d’être au centre de leurs propres expériences.  Ils sont près des deux tiers à souhaiter créer leur entreprise au lieu de de travailler pour une entreprise.
 

Une génération qui va changer les choses

Les jeunes de la génération Y veulent vivre une expérience qui les marquera. Ils veulent être reconnus, être parmi les meilleurs. Ils veulent apprendre à changer le monde, car c’est eux qui le feront, pas les générations qui les précèdent.
 
Ils ont déjà un énorme pouvoir d’influence. Pour la première fois, les générations précédentes aspirent à devenir la génération qui les suit. Compte tenu de leur nombre et de la place qu’ils prennent, ils sauront imposer rapidement leurs valeurs à toute la société. C’est la société qui devra s’adapter aux Y pas l’inverse. On constate déjà des changements très importants dans le monde du travail, où la rétention du personnel pose des problèmes majeurs. 
 

Le monde communautaire en mutation ?

En matière de solidarité, cette dynamique les amène à préférer soutenir directement leur voisin, leur famille, leurs amis, plutôt que les groupes communautaires, car ils tiennent à « faire partie de la solution ».  Par exemple, ils vont favoriser des initiatives comme les réfrigérateurs de ruelles plutôt que de faire des dons de nourriture dans les centres comme Moisson Montréal. 
 
Lors de groupes de discussions, on entend régulièrement les Y affirmer que les groupes communautaires sont pour ceux qui ne sont pas en mesure de trouver des solutions par eux-mêmes. Jamais pour eux.
 
Jusqu’à maintenant, il existe peu ou pas de données permettant de mesurer l’ampleur des changements que cette nouvelle génération imposera dans le monde communautaire. Mais une chose est sûre, il devra s’adapter rapidement. Les contours de ces changements commencent à se manifester par la volonté de s’impliquer dans des expériences nouvelles, une participation différente à la vie citoyenne ou par les choix sociaux qu’ils supportent. 
 
Quel est le sens réel que la génération Y donne au concept de communauté ? Est-ce une communauté d’intérêt, de proximité, de liens sociaux ? Comment va s’organiser la volonté d’agir des Y ? Peut-elle encore être canalisée par les groupes communautaires actuels ? Comment répondre adéquatement à cette génération qui milite pour des petits changements, dans leur milieu, à leur mesure, plutôt que pour de grandes réformes ? 
 
Nous savons qu’ils se méfient des institutions et des idéologies, qu’ils défendent des principes bien plus que des revendications. Comment le développement de politiques publiques et le financement adéquat des groupes communautaires peuvent-ils être supportés dans un tel contexte ?
 

Compter sur la communauté

La pandémie a exacerbé les difficultés de millions de Québécoises et Québécois. Santé mentale, difficulté à se loger, insécurité alimentaire, insécurité financière liée à l’inflation et à l’explosion des taux d’intérêt : pour bien des gens, la vie est aujourd’hui plus difficile qu’hier.
 
Si les plus démunis de notre société sont assurément plus vulnérables vis-à-vis de ces difficultés, on ne saurait ignorer qu’une part croissante de la classe dite moyenne en souffre également. Jamais les banques alimentaires, par exemple, n’ont été autant utilisées par des travailleuses et travailleurs, des propriétaires immobiliers, des familles où les deux parents ont des revenus. 
 
La faim étant impossible à ignorer, les banques alimentaires constituent peut-être le meilleur contre-exemple de l’attitude générale et de la perception de nos concitoyens par rapport aux organismes communautaires, soit des des organismes voués aux plus miséreux. 
 
Quelle que soit leur situation, personne n’aime être associé aux franges les plus défavorisées de la population – d’où l’hésitation à utiliser les services des organismes communautaires. 
 
Cette attitude est plus manifeste encore au sein de la génération Y. Par contre, dès lors qu’on leur parle de groupes issus de la communauté, leur attitude change immédiatement, essentiellement parce que cette expression fait davantage ressortir leur agentivité, c’est-à-dire le contrôle qu’ils peuvent exercer sur le monde qui les entoure, sur leur vie.
 
Un tel changement n’est pas uniquement cosmétique. Il suppose un positionnement radicalement différent des groupes communautaires, une nouvelle façon d’entrevoir leur action, leur image et leur clientèle, une ouverture à l’ensemble de la population. Bref, à se mettre au service de toute la communauté, en valorisant la mixité sociale. 
 
La Boîte de Comm. a développé au fil des ans une solide expertise en accompagnement d’OSBL en général, et d’organismes communautaires en particulier. Pour en savoir plus, contactez-nous! Il nous fera plaisir de discuter avec vous.
 

Comments are closed.